Etude d’un nouveau biomarqueur cardiaque des pathologies psychiatriques
Mis à jour le 04/11/2024
Porteur du projet : Charles VERDONK – Unité VIFASOM (Université de Paris / IRBA)
Titre du projet : Caractérisation du potentiel évoqué cardiaque comme biomarqueur innovant dans la prise en charge des pathologies psychiatriques
Le projet est conjointement soutenu par l’UNAFAM et la FRC. L’expertise scientifique a été assurée par le Conseil Scientifique de la FRC.
Montant : 80 000 €
« Je tiens à exprimer ma profonde gratitude à la FRC et à l’UNAFAM pour le financement accordé à mon projet de recherche […]. Grâce à votre soutien, j’ai eu l’opportunité d’accéder à un environnement de travail exceptionnel, tant sur le plan humain que matériel. Cet environnement a été crucial pour mener des recherches de qualité. J’espère sincèrement que mes travaux sur les interactions corps-cerveau contribueront à l’amélioration de la prise en charge des patients souffrant de maladies psychiatriques ». – Charles Verdonk
Descriptif du projet
La recherche en neurosciences ces dernières années a montré que les interactions entre le corps et le cerveau influençait notre santé mentale. La manière dont nous percevons notre corps, comme par exemple son état de stress ou de fatigue, est comme un sixième sens qui influence nos pensées, nos émotions et notre comportement. L’intéroception, c’est-à-dire la capacité à percevoir l’état de son propre corps, est variable selon les personnes et pourrait jouer un rôle important dans l’émergence de plusieurs maladies psychiatriques, telles que les troubles anxieux et dépressifs, le trouble de stress post-traumatique et les troubles du comportement alimentaire. Ainsi, par exemple, les études menées chez des personnes souffrant de trouble de stress post-traumatique ont montré que leur perception exagérée des battements cardiaques pouvait accentuer leur état de stress, alors même qu’elles se trouvaient dans un environnement objectivement calme. Cependant, les mécanismes cérébraux et physiologiques qui sous-tendent le dysfonctionnement de l’intéroception sont encore méconnus.
Ce projet vise à identifier un biomarqueur innovant de la qualité de la relation corps-cerveau grâce à l’étude de l’activité électrique cérébrale. Les chercheurs étudieront de façon spécifique le potentiel évoqué cardiaque (HEP) qui est la réponse électrique du cerveau aux battements du cœur. Leur hypothèse est que les propriétés du HEP pourraient renseigner sur la qualité des interactions entre le cœur et le cerveau. Le HEP sera analysé chez des patients souffrant de troubles anxieux et/ou de troubles du comportement alimentaire, en comparaison d’individus en bonne santé, afin de voir si ses propriétés permettent d’expliquer l’état de santé mentale des patients, ce qui constituerait une preuve de son intérêt comme outil diagnostique. Plus particulièrement, ils analyseront l’effet d’une modulation du système cardiovasculaire (augmentation expérimentale de la fréquence cardiaque) sur l’amplitude du HEP et sur la performance dans une tâche comportementale d’intéroception cardiaque. Cette tâche consiste pour les participants à évaluer en continu leur expérience de l’intensité des sensations cardiaques en faisant tourner un cadran dans le sens des aiguilles d’une montre ou dans le sens inverse, lorsque les sensations augmentent ou diminuent.
Les résultats de ce projet contribueront à l’identification d’une signature cérébrale du dysfonctionnement de l’intéroception, qui pourra conduire au développement de nouveaux outils pour le diagnostic précoce et le traitement personnalisé de ces pathologies psychiatriques.
Premiers résultats
Ce projet a permis d’étudier les interactions entre le corps et le cerveau et leur rôle dans les maladies psychiatriques en deux parties :
Partie 1 – Etude des interactions cœur-cerveau et lien avec l’anxiété
Les chercheurs ont analysé comment le cerveau réagit aux battements du cœur chez des patients souffrant de trouble anxieux généralisé. En utilisant des techniques avancées de neuroimagerie, ils ont pu observer que ces patients ont une activité cérébrale inhabituelle en réponse aux battements du cœur, et celle-ci est associée à des sensations cardiaques très intenses. Ces données suggèrent que le système nerveux réagit de manière excessive aux battements du cœur dans le trouble anxieux généralisé, ce qui pourrait expliquer certains symptômes très fréquents comme les palpitations. Cette étude a permis de mieux comprendre comment l’anxiété affecte la communication entre le cœur et le cerveau. Elle ouvre aussi la voie à de futures recherches pour le développement de nouvelles approches centrées sur les interactions cœur-cerveau dans la prise en charge du trouble anxieux généralisé.
Partie 2 – Etude des interactions estomac-cerveau et lien avec l’anorexie mentale
L’équipe du Dr. Verdonk a développé une approche innovante basée sur l’ingestion d’une capsule vibrant dans l’estomac combinée à l’électroencéphalographie pour étudier comment les personnes souffrant d’anorexie mentale perçoivent les signaux corporels internes. Les premiers résultats montrent que les personnes anorexiques ont des croyances biaisées et rigides sur leurs sensations corporelles, ce qui pourrait influencer leur comportement alimentaire et leur réponse au traitement. Ce travail doit permettre de mieux caractériser la qualité des interactions estomac-cerveau dans l’anorexie mentale, ouvrant ainsi la voie au développement de nouveaux outils personnalisés pour prédire la réponse au traitement et améliorer les soins cliniques.
Cette deuxième partie est toujours en cours d’étude, le recueil de données se poursuit.
Les publications
Ces résultats ont fait ou feront l’objet de deux publications, démontrant leur importance pour la communauté neuroscientifique :
- C. Verdonk, A. R. Teed, E. J. White, X. Ren, J. L. Stewart, M. P. Paulus, S. S. Khalsa. Heartbeat-evoked neural response abnormalities in generalized anxiety disorder during peripheral adrenergic stimulation. Neuropsychopharmacology (2024)
- S. S. Khalsa, C. Verdonk. Atrial Fibrillation as a Disorder of Heart-Brain Communication. JACC: Clinical Electrophysiology (2022)
Les résultats seront également publiés sous forme de chapitre de livre.
Ces résultats ont également fait l’objet de 7 communications orales et posters lors de congrès scientifiques nationaux et internationaux.
—
Ce projet est international puisqu’il implique une équipe française mais aussi l’équipe américaine du Pr. Sahib Khalsa (Laureate Institute for Brain Research – Oklahoma), spécialiste de l’intéroception et de la modulation pharmacologique du système cardiovasculaire.
Projet co-financé par l'UNAFAM
La FRC et ses membres lancent chaque année leur Appel à Projets en recherche sur une thématique donnée en relation avec les pathologies neurologiques et psychiatriques.
C’est dans ce cadre que l’UNAFAM, membre actif de la FRC, s’est positionnée pour soutenir ce projet de recherche sélectionné par le Conseil Scientifique de la FRC, et en lien avec les maladies psychiatriques.
Après un Doctorat de médecine générale, Charles Verdonk a exercé pendant deux années comme médecin, puis a effectué un Master de recherche et un Doctorat de Neurosciences. Il a effectué sa formation médicale et de chercheur comme médecin du Service de Santé des Armées (SSA) et a mené ses travaux de recherche en neurosciences cognitives au sein de l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées (IRBA). Charles Verdonk est maintenant chercheur affilié à l’Unité VIFASOM de l’Université de Paris. Ses recherches portent sur les bases neurobiologiques de la conscience du corps et du rôle que celle-ci pourrait jouer dans l’émergence des pathologies mentales et somatiques.
Le centre de recherche
Ce projet est mené par l’Unité VIFASOM affiliée à l’Université de Paris et à l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées.
