La créativité

La créativité n’est pas uniquement liée aux domaines artistiques tels que l’écriture, la composition musicale ou la peinture. Elle s’étend également entre autres à la recherche scientifique, aux progrès technologiques et à notre vie quotidienne, où nous sommes constamment confrontés à des problèmes sans solutions évidentes nous demandant d’être créatifs. L’étude de capacité fascinante, bien que complexe, se situe à l’intersection de plusieurs disciplines, notamment les neurosciences. Comment pouvons-nous définir la créativité et comment le cerveau produit-il des idées créatives? Quels facteurs influent sur notre capacité à être créatifs ?

 

Définition

La créativité est un concept complexe. Elle échappe à une définition unique en raison des nombreuses approches, théories et modèles qui cherchent à l’expliquer, traversant diverses disciplines et impliquant une multitude de facteurs. En neurosciences, elle est communément définie comme la capacité à générer quelque chose d’original et adapté au contexte, que ce soit une idée, un objet ou une méthode. On distingue deux formes principales de créativité : la « créativité avec un grand C, » réservée à ceux dont la contribution perdure dans l’histoire et qualifiée d’extraordinaire, et la « créativité avec un petit c, » présente dans la vie quotidienne face à des problèmes sans solutions prédéfinies. Nous sommes donc tous capables d’être créatifs.

 

La créativité dans le cerveau

La recherche a mis en lumière grâce à la neuroimagerie ce qu’il se passe dans le cerveau lorsque que nous faisons appel à notre créativité. Les neuroscientifiques ont montré l’importance de 3 réseaux cérébraux. Un réseau cérébral est constitué de différentes zones du cerveau « communiquant et travaillant » ensemble.

Le « réseau par défaut », ou réseau de l’imagination, regroupe plusieurs régions du cerveau (cortex médial préfrontal, cortex cingulaire postérieur, lobes pariétaux et temporaux) qui s’activent lorsque nous sommes engagés dans des pensées spontanées comme l’imagination ou le vagabondage mental. Ce réseau est ainsi nommé car il se met en marche lorsque nous sommes au repos, sans être occupé par une tâche nécessitant une attention particulière. Dans le processus créatif, ce réseau jouerait un rôle clé dans la génération et l’association spontanée d’idées et d’images mentales, explorant ainsi plusieurs solutions possibles à un problème. L’hippocampe, responsable de la mémoire, participerait également en intégrant nos connaissances et expériences passées dans ce processus de génération d’idées.

Le réseau exécutif ou de contrôle est un ensemble de régions qui s’activent lorsque nous devons nous concentrer ou encore contrôler nos pensées ou comportements. Il implique en particulier le cortex préfrontal dorsal et le cortex frontal. Ce réseau serait important dans l’évaluation de la pertinence des idées et réorienter si nécessaire la démarche de recherche pour trouver une idée adéquate. Il permettrait également d’inhiber les idées non appropriées et les pensées automatiques pour nous permettre de penser de manière originale.

Le réseau de saillance est un ensemble de régions (cortex cingulaire antérieur, insula) qui agit comme un interrupteur entre le réseau par défaut et le réseau exécutif. Ce réseau pourrait jouer un rôle clé dans l’alternance entre la génération d’idées et l’évaluation de celles-ci: il sélectionnerait les idées les plus originales issues du réseau par défaut afin de les faire évaluer par le réseau exécutif.

Ainsi, le processus créatif impliquerait un dialogue entre trois réseaux cérébraux, alternant entre la génération d’idées créatives et l’évaluation de leur pertinence en fonction du problème. Toutefois la contribution spécifique de ces réseaux dans le processus créatif est actuellement en cours d’étude et constitue pour le moment une série d’interprétations.

 

Est-il possible d’observer la créativité dans notre cerveau ?

Contrairement à l’idée traditionnelle du « cerveau droit » comme siège de la créativité, la créativité mobilise des connexions entre différentes zones des deux hémisphères cérébraux. Précisément, les personnes les plus créatives auraient une plus forte connexion entre leurs deux hémisphères.

Une étude a révélé que les individus plus créatifs présentaient une co-activation de ces trois réseaux, alors que généralement, chez la plupart d’entre nous, ils ne sont pas activés simultanément : l’activation du réseau par défaut entraîne la mise en veille immédiate du réseau exécutif. De plus, les chercheurs ont montré que plus les connexions entre ces réseaux, en particulier entre le réseau par défaut et celui exécutif, étaient fortes, plus les individus démontraient de la créativité.

 

Les 4 grandes étapes du processus créatif

Le concept de processus créatif désigne une succession d’étapes de pensées et d’actions servant de cadre pour expliquer comment nous générons des idées créatives.  En 1926, Graham Wallas a proposé un modèle permettant de décomposer le processus créatif en 4 étapes :

La préparation pendant laquelle le cerveau collecte et analyse des informations afin de résoudre un problème, suivie de l’incubation une période pendant laquelle le cerveau travaille « en coulisses », un moment où nous laissons décanter le problème en faisant autre chose. Ensuite survient l’illumination, encore appelé « Eurêka », où les idées semblent prendre forme de manière soudaine et pour finir la vérification intervient : le cerveau évalue la pertinence de cette idée par rapport au problème posé. Bien qu’il y ait eu plusieurs autres théories depuis, ce modèle reste largement un modèle de base pour étudier la créativité.

Selon diverses recherches, la phase d’incubation serait propice à la résolution de problèmes et à l’émergence soudaine d’idées créatives, notamment lorsqu’elle implique des activités ni trop difficiles ni trop proches du problème initial. Par ailleurs, l’influence du sommeil, en particulier de la phase d’endormissement, sur le processus créatif a été étudiée. Il semblerait ainsi que l’endormissement favorise également l’émergence de moments « Eurêka« .

 

Les facteurs influençant notre créativité

Les facteurs qui influenceraient la créativité engloberaient à la fois des capacités cognitives, des traits de personnalité, des émotions, la motivation et l’environnement.

D’un point de vue cognitif, la capacité à associer des idées, à imaginer diverses solutions pour un même problème (pensée divergente), à établir des liens entre des données a priori non liées, ainsi qu’aborder le problème sous différents angles seraient des compétences clés dans le processus créatif. Les tests de créativité en neurosciences et en psychologie cognitive évaluent cette dimension.

Des traits de personnalités comme la persévérance, l’ouverture à de nouvelles idées, la tolérance à l’ambiguïté et la prise de risque favoriseraient notre capacité créative.

Les émotions joueraient également un rôle crucial dans le processus créatif. Des recherches indiquent que tant les émotions positives que négatives peuvent favoriser la créativité. La joie, par exemple, pourrait ouvrir davantage à de nouvelles idées, tandis que des émotions négatives comme la frustration ou la colère permettraient de promouvoir la résolution de problème et l’évaluation critique des idées. En ce qui concerne la motivation, des études ont révélé que la motivation intrinsèque, c’est-à-dire le désir intrinsèque de résoudre un problème ou d’accomplir une tâche, exerce une influence positive sur la créativité.

De même, l’environnement serait une composante essentielle de la créativité. En effet, les idées créatives émergent des informations externes, tirées de notre expérience et nos cinq sens joueraient un rôle crucial dans la collecte de ces informations. Ces dernières contribueraient à remodeler les connexions neuronales grâce à la plasticité cérébrale et seraient ensuite stockées en mémoire et serviraient de ressources pour la génération d‘idées créatives. Par ailleurs, un cadre physique et social qui encourage l’émergence d’idées originales contribuerait à stimuler la créativité.

 

Conclusion

Les recherches sur la créativité nous éclairent davantage sur la complexité du processus créatif engageant pleinement notre cerveau. Elles soulignent que la créativité est une capacité présente en chacun de nous, influencée par de nombreux facteurs et potentiellement observable dans notre cerveau. Sa compréhension approfondie ouvre la voie à la découverte de solutions visant à stimuler cette capacité.

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